Maaza Mengiste

Nous voyons la jeune Aster. Nous la voyons se glisser dans l'escalier tandis qu'un chœur de femmes hulule dans son dos. Elle s'agrippe à la rampe pour se donner du courage, traîne son corps de plomb d'une marche à l'autre. Son cœur d'enfant, affolé de terreur, fait frisonner la peau de sa poitrine. Nous entendons les hommes rire dans la salle du bas. Le frottement des lourdes chaises résonne dans toute la demeure. Une lampe à pétrole oscillant sur un long clou illumine le palier devant elle. Des ombres filent sur les murs, et que peut-on faire sinon se replier en regardant sa mère ? Elle est toute jeune, quand on y songe. Ce n'est encore qu'une petite fille, et quand on lui dit : Vas-y, Aster, va rejoindre ton époux, que peut-elle faire sinon obéir ? En haut des marches se tient la cuisinière, qui lui ouvre les bras pour la prendre p ar la main et l'entraîner vers la chambre... (…) Voici une chose : sa mère lui a dit que, le moment venu, elle sau...