Vicente Huidobro
Créationnisme, ultraïsme... Ce fut,
avec dada, le zénithise et le zaoum, une éclosion un peu folle de
mouvements poétiques, aussi folle que l'éclosion de pays
imaginaires comme la Tchécoslovaquie ou la Yougoslavie. Jeune homme
riche et fantasque, Vicente Huidobro débarquait du Chili avec une
cargaison d'onomatopées et d'images descendues en parachute (il
adorait ce véhicule d'Icare) sur l'Europe encore gazée mais déjà
férue d'exotismes lyriques. L'ombre toute chaude d'Apollinaire, le
bras valide de Cendrars, les guitares de Reverdy : il n'en
fallait pas plus pour que ce Fitzgerald des Andes étonne et séduise.
Puis vinrent les années sérieuses, les années graves, les années
tragiques. Huidobro était bien oublié à Paris, en 1948, lorsqu'il
mourut à cinquante-cinq ans.
Alain Bosquet (NRF –
juillet 1957)
Débarquer des comètes comme des touristes
Ensorceler des touristes comme des serpents
Récolter des serpents comme des amandes
Dévêtir une amande comme un athlète
Débiter des athlètes comme des cyprès
Illuminer des cyprès comme des lampions...
Voici voici déjà l'hirondelle
Voici voici déjà la frêlirondelle
Voici déjà la musirondelle
Voici la hautirondelle
Voici la fleurirondelle
Voici la doucirondelle
Voici déjà la lyrondelle
Voici déjà la rirondelle.
Si le paysage devenait colombe
La mer le mangerait avant la nuit
Mais la mer prépare un naufrage
Ensorceler des touristes comme des serpents
Récolter des serpents comme des amandes
Dévêtir une amande comme un athlète
Débiter des athlètes comme des cyprès
Illuminer des cyprès comme des lampions...
Voici voici déjà l'hirondelle
Voici voici déjà la frêlirondelle
Voici déjà la musirondelle
Voici la hautirondelle
Voici la fleurirondelle
Voici la doucirondelle
Voici déjà la lyrondelle
Voici déjà la rirondelle.
Si le paysage devenait colombe
La mer le mangerait avant la nuit
Mais la mer prépare un naufrage
et pense à autre chose.
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