La guerre des dinosaures

Miguel Prenz appartient à une nouvelle génération de journalistes-écrivains qui incarne la tradition de la Cronica en Amérique latine. Il écrit dans les plus grandes revues du continent. La Guerre des dinosaures est son premier livre traduit en France.
Quand, à partir 1990, le président libéral, Carlos Menem, décide de privatiser à tout-va, il commence par l'entreprise pétrolière (qui assurait pourtant un rente importante à l'Etat) et en particulier par Hidronor à El Chocon en Patagonie.
« Camarades, la nuit approche », avaient dit les délégués syndicaux, mais les employés d'Hidronor ne les prirent pas au sérieux, « parce que ce sont tous des fouteurs de merde comme tous les trotskystes ».
Et la nuit leur tomba dessus.
Entre 1990 et 1992, près de 30 000 travailleurs se sont retrouvés sans boulot. Le chômage touchait presque tout le monde, on parlait de 80%, voir 90%, en fait tout le monde travaillait avec ou pour Hidronor. Ils furent nombreux à partir tenter leur chance ailleurs car, pour couronner le tout, le projet d'implantation d'une usine d'engrais, qui aurait généré des emplois, venait d'être annulé. Ceux qui restèrent survécurent comme ils purent. El Chocon était destiné à devenir une ville fantôme.

C'est alors que Ruben Carolini qui passait son temps dans le désert à s'entraîner au tir, à chasser des oiseaux, à prendre des photos, trouva un os d'une taille peu ordinaire.

Il tira de sa bibliothèque un livre consacré aux dinosaures -sujet qui l'intéressait déjà avant- et lut une information qui ne manqua pas de la surprendre : le tibia du Tyrannosaurus rex, le carnivore le plus grand du monde alors, mesurait 82 centimètres tandis que celui qu'il avait trouvé faisait 1,10 mètre.

Cette découverte et celle d'autres ossements importants redonna, grâce au tourisme, une activité à la ville : un musée s'est créé qui reçoit plus de 80 000 visiteurs par an. Mais la guerre commençait pour Ruben Carolini, car il lui fallut affronter les spécialistes et les paléontologues jaloux de sa trouvaille, puis les communes avoisinantes qui voulaient elles aussi profiter de la manne qui leur tombait un peu du ciel. Tout ce qu'écrit Miguel Prenz est vérifiable, car il s'est rendu sur place et a observé les luttes de pouvoir entre maires, directeurs de musées et paléontologues, capables de tout pour récupérer les dinosaures. Autant de personnages qui tissent une toile de fond des plus inquiétantes : celle de l'ambition des hommes. Ajoutons aussi la visite du plus haut comique des créationnistes de tout poil qui expliquent que ces dinosaures vieux de 75 millions d'années n'ont pas plus de 6000 ans : c'est la Bible qui le dit :
Les écrits de Darwin, sans aller chercher plus loin, rejettent Dieu du début à la fin. De plus, il était franc-maçon et la franc-maçonnerie est une secte satanique. Nous voyons la science d'un bon œil, mais uniquement lorsqu'elle s'adapte à la Bible, et non l'inverse.

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