C.A. Campos
Depuis le temps qu'on me réclame un poème scatologique, en voici un bien curieux de C.A. Campos, écrivain dominicain né en 1973. Il réside à New York depuis 1984. Il écrit aussi bien en anglais qu'en espagnol.
Du verbe et de son importance
que tu chies aujourd'hui, ou demain, si tu ne l'as pas encore faittu te nettoies, ou tu te laves ou tu fais semblantet tu es prêt, colorín colorado, fin de l'histoire
et tu retournes alors avec plus ou moins d'envieconjuguer à l'indicatif ou au subjonctif(c'est au choix)le susdit verbe
et tu continues ou tu croises les bras :tu pries pour chier plus la prochaine fois (si tu es un enfoiré)ou pour chier moins en ce qui te concerne (si tu pensesà l'environnement : ne pas user trop d'eau, de papier-toilette, etc)
et tu es prêt, encore une fois :c'est le fameux éternel retour cher à Nietzscheexpliqué dans un luxe de détails
alors faites-moi la grandissime faveurde ne pas venir me voir avec vos conneries habituelles :et mettez-moi le verbe aimer où je pense.
mais n'oublions pas que Victor Hugo s'y est mis avec gourmandise, lui aussi :
L'Ode
à la merde
Lorsqu’après
un repas l’estomac vous tiraille,
Que
tout au fond de vous le haricot travaille…
Qu’il
est doux de penser que bientôt, pas très loin,
Vous
courrez prestement pour chier dans un coin.
Qu’on
est bien, accroupi, les coudes sur les cuisses,
Tandis
qu’environné d’une troupe de Suisses
On
exhibe au grand air l’hémisphère dodu
Qui
cache encore aux yeux le chef-d’œuvre attendu.
Ami
! Il est, dit-on, un art en toute chose,
Aussi
bien à chier qu’à cultiver les roses.
Or
donc, pour opérer avec discernement,
Gardez-vous
qu’un papier ne vienne absurdement
Lorsque
l’œuvre est parfaite, écraser l’accessoire.
Tss
! Tss ! Pas de papier si vous voulez m’en croire,
Laissez
aux constipés ce procédé piteux
Qui
gâche absolument un plaisir si juteux,
Que
le bout de l’index, seul, fasse cet office.
Quand
il aura touché trois fois votre orifice
Qui
vient de s’entrouvrir comme une tendre fleur,
Il
teindra votre doigt d’une étrange couleur.
Ami,
si vous voulez encor goûter des charmes,
Sur
la blanche muraille, esquissez quelques larmes.
Et
si, par aventure, abondant est l’extrait,
De
celle que vous aimez vous ferez le portrait.
Victor
Hugo
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