Roberto Perinelli

Coronación (Couronnement), pièce écrite par Roberto Perinelli spécialement pour le cycle de Théâtre Ouvert en 1981. Cela se passe dans une maison où Olga, la maîtresse de maison, a donné l'hospitalité à Carmen et à sa fille Lily, le temps d'une inondation. L'eau continue de monter autour de la maison et c'est l'attention d'une barque. Dès le début, l'auteur insiste sur la différence de classes sociales. Carmen est décrite comme une femme de quarante ans, totalement négligée, et se promenant déchaussée, contrairement à Olga qui préserve le cadre raffiné qu'elle a toujours aimé.
La rencontre entre ces femmes fait donc apparaître deux univers distincts, ce qui va aboutir à un affrontement. Bien que voisines, les deux femmes se rendent compte de leur différence sociale.

CARMEN – Qui nous a obligé à vivre si près de la côte ? Vous, quelqu'un vous a obligé ?
OLGA – Non, mais j'aime cet endroit.
CARMEN – Si près, j'ai dit ? Mais non, collé, je devrais dire. Seulement maintenant nous sommes dans la calamité. Si nous habitions sur la colline...
OLGA – Tout le monde ne peut pas.
CARMEN – Vous ne pouvez pas, vous ?
OLGA – Ca me paraît difficile.
CARMEN – C'est vrai qu'ici vivent les gens comme vous.
OLGA – Comment ?
CARMEN – Des blondes.
CARMEN – Depuis quand que vous habitez ici ? Il n'y a pas longtemps... Je me souviens très bien quand est arrivé le camion de déménagement qui a apporté tous ces meubles. Je m'en souviens comme si c'était hier. On se disait qu'il y en avait pour de l'argent. C'était que du bon goût.

On sait depuis le début que Carmen possède un revolver ; elle le montre à Olga qui prend peur. Malgré le climat de violence latente, ce revolver n'est utilisé à la fin que pour appeler une embarcation de secours qui passe un peu plus loin. Avant de partir sur la barque, Carmen laisse cette arme sur la commode d'Olga pour qu'elle l'utilise à son tour si c'est nécessaire. L'eau continuant de monter, Olga veut faire usage du revolver, mais il n'y a plus de balle. Ainsi l'arme est mortelle non par elle-même, mais parce qu'elle ne fonctionne plus.

Interview de Roberto Perinelli (en mai 2007)

Qu’est-ce que le Théâtre ouvert ?
En 1976 a eu lieu un coup d’état militaire, génocide, dans lequel sont morts ou portés disparus 30000 personnes, beaucoup de jeunes.
Il y a avait une grande persécution dans le milieu intellectuel, pas seulement théâtral. Donc beaucoup de gens ont fuis. Des comédiens sont partis en Espagne, beaucoup d’intellectuels sont partis au Venezuela, au Mexique.
Le théâtre a été un peu moins affecté car on ne lui accordait pas une grande importance. On faisait quand même partie d’une liste noire et on ne pouvait pas jouer dans les théâtres officiels, on ne pouvait pas non plus écrire pour la TV qui était aussi publique. La situation était encore plus dure pour les comédiens car nous au moins on pouvait écrire sous un pseudonyme ! Donc en 1980 a commencé a circuler une idée de faire quelque chose. On s’est tous réunis et on a fait un truc fantastique : 21 pièces d’une demi heure jouées sur une semaine pendant deux mois a 18h. Des pièces militantes. C’était la réaction du monde de la culture contre la dictature.
La dictature ne s’est pas intéressée a nous jusqu'à ce qu’on commence. Mais la queue immense, a attiré leur l’attention. Ils ont incendié le théâtre a 3h du matin. Tout le monde intellectuel s’est mis de notre coté. On s’est vu offert 17 théâtres pour continuer le projet ! On en a choisi un, qu’on pourrait qualifier de boulevard, où la nuit il y avait des spectacles de filles nues, car il était très visible, en pleine rue Corrientes. On voulait être sous le nez de la police !
On a fait le grand cycle du Théâtre Ouvert de 1981 a 1983. On a eu des problèmes avec la dictature mais petits.C’était une époque merveilleuse, tout le monde se connaissait…On jouait avec notre vie mais on ne s’en rendait pas compte. C’est plus tard qu’on a réalisé ! A la fin de la dictature, en 1984, avec l’arrivée du gouvernement légitime, beaucoup d’entre nous ont commencé a travaillé pour l’Etat. C’et a ce moment que je me suis vu proposer la direction de l’Ecole. Avec les autres on reste une tribu !

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