Le coronavirus et la fin du néo-libéralisme
Le
coronavirus et la fin du néo-libéralisme post-moderne
Juan
Antonio Molina en nueva tribuna (Buenos Aires)
Voici le moment où le
capitalisme dans sa version néolibérale est réduit à l'absurde,
tout comme son support métaphysique. Cette crise du coronavirus
remet tout en question. Elle affecte gravement la santé des
citoyens, la vie des entreprises, l'avenir des patrons, des
travailleurs et surtout des travailleurs précaires et pauvres. Tous
dans le même tourbillon, parce que dans les sociétés modernes il y
a une « communauté de destin » qui nous lie
inextricablement les uns aux autres. Avoir cassé ce lien, même
émotionnellement, en répandant la peur de l'autre, l'individualisme
radical, le manque de solidarité sociale, le « sauve qui
peut » que nous impose le néolibéralisme nous rend
aujourd'hui plus fragiles. C'est le fruit de cette perverse hégémonie
culturelle qui fait que nous nous affrontons au lieu de nous unir
pour affronter un ennemie commun auquel personne ne peut échapper
seul.
L'après-coronavirus sera
comme une comme l'après-guerre. Nous ne trouverons que des
décombres. Alors quel sens auront toutes les excroissances
néolibérales qui ont démontré dans cette crise, mais déjà en
2008, que ne sont prises que des mesures sommaires et trompeuses pour
imposer une loi implacable sur une minorité à exploiter, pour
marginaliser et appauvrir les classes sociales défavorisées ?
Surtout lorsque le coronavirus nous oblige à repenser le sens de
notre vie, notre façon de vivre ensemble, les dangers de la
globalisation, et déjà qu'il est possible qu'apparaisse une autre
réalité, une véritable renaissance, y compris en remettant en
questions les règles financières internationales. Le problème est
que nous avons perdu le sens de l'équilibre entre les diverses
composantes de notre société.
Joseph
Stiglitz
Joseph
Stiglitz,
prix Nobel d'Economie en 2001, a écrit un article publié dans la
revue Social Europe The
end of neoliberalism and the rebirth of history,
dans lequel il montre les conséquences négatives de l'application
des politiques néolibérales, qui imposent des réformes destinées
à affaiblir les syndicats et à faciliter le licenciement des
travailleurs, comme également les politiques d'austérité qui n'ont
d'autres buts que de diminuer la protection sociale au moyen de
coupes dans les dépenses sociales publiques. Une des conséquences a
été l'énorme accroissement des inégalités dans la majorité des
pays qui ont appliqué de telles politiques.
Le néolibéralisme
attaque toutes les subjectivités et les interprétations
idéologiques à commencer par le fait de vivre ensemble, puisqu'il
ne croit que dans une société où les individus sont en compétition
les uns avec les autres (et avec de grandes inégalités). Il prédit
la libéralisation totale de l'économie, le libre marché général
et une réduction drastique des dépenses publiques au profit du
secteur privé qui devrait se charger des compétences
traditionnellement assumées par l'Etat.
Cependant, cette
supplantation de l’État, à cause de la supposée incompétence du
domaine public face au privé, disparaît quand l’inefficacité des
banques ruine des secteurs financiers entiers. On sollicite alors
l'intervention de l'Etat, reconnaissant implicitement la qualité de
la gestion publique, mais aussi se débrouillant systématiquement
pour privatiser les bénéfices et collectiviser les pertes. Que
serait la lutte contre le coronavirus avec un système de santé
complètement privatisé et consacré à l'unique objectif du
bénéfice patronal ?
Cette économie
post-moderne se nourrit d'une vision apocalyptique du discours
politique des créateurs de capitaux. L'Etat est considéré
coupable, inefficace, corrompu et trop lourd pour la compétitivité
du marché et des lois de l'offre et de la demande. Le capitalisme se
réinvente en changeant les références, les imaginaires et les mots
face à l'Etat providence. Tout se modifie pour donner consistance à
un être dépolitisé, social-conformiste. Un parfait idiot social.
Les vieilles structures cèdent le pas à un ordre social dont les
réformes exaltent les valeurs individualistes, le moi au-dessus du
nous, et l'autre est considéré comme un obstacle, un concurrent
qu'il faut détruire... Mais voilà qu'est arrivé le coronavirus.
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