Mariano Moro
Mariano Moro est un dramaturge
originaire de Mar del Plata, résidant à Buenos Aires. Il a, depuis
ses débuts, privilégié le travail sur le théâtre et la poésie.
Il est l'auteur de nombreuses pièces, mais il a aussi mis en scène
Shakespeare, Lope de Vega, Calderon, ainsi que Roberto Cossa et Paco
Urondo. Il a initié des spectacles mélangeant théâtre et danse
contemporaine. Il a reçu plusieurs prix en Argentine et au Brésil.
Web: http://www.marianomoro.blogspot.com
Le titre de cette pièce est DAR EN LA
TECLA, que l'on peut traduire par DIRE CE QU'IL FAUT AU BON MOMENT.
BLANCA – C'est la seule qui soit
gentille dans cette famille. Elle est douce et bonne. Elle tient
de sa grand-mère. Par le caractère, pas par le physique. Tu dois
faire attention parce qu'elle a tendance à grossir, comme toutes les
femmes de ta famille. Moi, à son âge, j'étais fine comme un bâton.
MONICA – Tu me trouves grosse ?
BLANCA - Non, toi, ça va encore.
Tu auras fait un pacte avec le diable. Même si cette robe et cette
coiffure ne t'avantagent pas du tout.
MÓNICA – Mais les boucles
d'oreilles, elles te plaisent ?
BLANCA- Les boucles d'oreilles, c'est
pire que tout. Comme tu peux être vulgaire.
MÓNICA – Moi, je n'ai pas peur du
ridicule. Et toi, maintenant, tu es plus sobre, avec l'âge, mais
quand tu étais jeune fille, tu n'avais pas peur de briller.
BLANCA - Moi? C'est très subtil de
ta part de me traiter de vieille. Je ne dis pas qu'en d'autres temps
je n'avais pas une certaine coquetterie, que j'ai toujours, mais j'ai
toujours évité le mauvais goût. C'est un exemple que tu devrais
imiter. Si tu savais comme ma belle-mère et ma belle-soeur me
faisaient comme réflexions ! Pourquoi me suis-je fourrée dans
ce nid de vipères ? Quelle idiote je fais !
MÓNICA – Et l'amour ?
BLANCA – L'amour ? Ne dis pas de
bêtises ! L'ignorance ! Nous étions si malheureux à cette époque.
Tu arrives à croire que je me suis mariée vierge ? Si c'était
aujourd'hui, ils ne m'auraient pas comme ça. Tout juste mariée, je
me suis achetée un tissu pour me faire une jupe, et quand j'ai fini
de la coudre, voilà la belle-mère qui me dit : « Mais
qu'est-ce que vous faites ? (toujours elle me vouvoyait) C'est
extravaguant cette jupe avec votre taille actuelle. Vous ne savez
donc pas que les femmes enceintes grossissent ? Préoccupez-vous
davantage de la maison et moins de votre toilette. » Elles me
voulaient comme bonne, ces juments. La vieille et la fille. Et ton
beau-père, qu'il repose en paix, tu crois qu'il m'aurait défendu
une seule fois ? Il ne pensait qu'à boire et à bambocher avec
ses amis. Que le diable l'emporte ! Alcoolique depuis l'âge de
douze ans, et moi qui voulais le mettre au pas, idiote que j'étais.
Maintenant qu'il est mort, j'ai dû retourner chez ton père, et
c'est la même chose : il est grossier, ivrogne et stupide. Une
copie crachée de son père. Et si je dis quelque chose, il m'aboie
dessus. Impossible de parler avec lui. C'est transmis par le sang,
cela. Si au moins j'avais eu des filles, elles auraient eu quelque
chose de moi.
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