Haïti tend les bras et crie pitié
Gens accroupis
et eau croupie
un peuple se tasse
s’entasse
comme pour se faire
pardonner d’exister.
Sur le mur blanc
en lettres rouges :
« Haïti tend les bras
et crie pitié »
Des regards qui en disent long
un œil qui vous défie
et l’autre qui vous invite
à entrer et à danser
Mais entrer où ?
Puisqu’on vit dehors
et en dehors de tout.
Le bruit des génératrices !
Il faut choisir : le silence ou la lumière.
Assourdissante cité
comme un gros bourdon
pris dans une toile d’araignée
Gens accroupis
et eau croupie
Les enfants des écoles
ont la tête décorée
de boules colorées
Rien à manger, alors
allons nous coiffer.
Et puis les soirs d’orage
les fleuves de boue
détruisent les rues et l’espoir
de ceux qui sont debout
et qui se grandissent
pour regarder l’eau d’un peu plus loin.
La pluie en ville n’est d’aucune utilité
surtout cette pluie jamais civilisée
Le lendemain, c’est double travail
L’Haïtien met la main sur les ordures
Quand l’Européen ne sait où mettre le pied
Gens accroupis
Et eau croupie
Un tap-tap bondé s’élance
Jésus-Christ est au volant
Il croise Saint-François en moto
En fait c’est toute la bible
qui a débarqué un beau jour
pour une cérémonie vaudou
Apôtres et saints courent les rues
Ce sont eux les princes du port
Le loto «Fils éternel » fait le plein
Gens accroupis
et eau croupie
Un peuple se tasse
et moi qui passe
Je ne suis déjà plus étranger
Déjà ma peau n’est plus blanche
et la main qui prend ma main
me convertit, me créolise.
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