Gihan Omar
Gihan Omar sait narrer dans l'espace du poème. Elle dit les choses du quotidien d'une façon profonde et simple. La vie de tous les jours est saisie dans un mouvement dynamique et paisible.
Tout est enchevêtré de manière indissoluble, mais elle le fait dans un langage clair, simple et expressif, se rapprochant de la philosophie poétique de Yannis Ritsos. « La poésie n’a jamais le dernier mot. Mais toujours le premier », dit-elle. Son deuxième recueil de poèmes en prose Qabl An Nakrah Paolo Coelho (avant de détester Paolo Coelho) a été traduit de l’arabe vers le français en 2010, aux éditions L’Harmattan. « Dans ce recueil, je conteste la Légende personnelle de L’Alchimiste de Coelho. Je vois que les signes ne sont pas toujours un bon guide à suivre, ils peuvent souvent nous tromper ou nous dérouter ».
Gihan Omar est née dans la ville de Belbeis, au gouvernorat de Charqiya, d’un père officier-ingénieur en aéronautique à l’armée égyptienne. Dans sa ville natale, elle menait une vie très disciplinée. Elle aimait jouer auprès de vrais avions qu’hébergeait le complexe académique de l’armée de l’air égyptienne. « J’aimais aussi les bulles vides des caricatures du grand Hégazi, en ajoutant mes propres commentaires. Elles étaient publiées dans le magazine Magued que mon père m’achetait régulièrement. L’ambiance calme de Belbeis a fait de moi une personne de nature méditative ».
Dans les années 1980, à l’âge de 9 ans, Gihan est partie vivre avec sa mère dans la banlieue de Hélouan, à quelques kilomètres du Caire. A l’école, les cours de rédaction en langue arabe l’enchantaient. Elle adorait lire Mahfouz, Milan Kundera, Mario Vargas Llosa, Franz Kafka et Federico Garcia Lorca. « C’est à travers Mahfouz que j’ai découvert le monde », lance-t-elle.
Ce n’est qu’en 2004 que Gihan a confirmé son style littéraire et a publié son premier recueil, Aqdam Khafifa (des pas légers), aux éditions Charqiyat. Un recueil que la grande critique Safinaz Qazem a décrit en disant: « Il ne produit pas des questionnements, mais un étonnement soudain, avec une émotion tout à fait neutre ». Reflétant les divers états des individus, les poèmes de Gihan Omar sont traduits en plusieurs langues: l’anglais, le français, le bosniaque, le roumain, le coréen, le turc et l’allemand. Une reconnaissance mondiale. D’ailleurs, l’un des poèmes de son dernier recueil vient d’être sélectionné pour faire partie de l’Anthologie de la poésie arabe, publiée par la prestigieuse Université Yale.
Sur la
plage, je
n’ai
trouvé
qu’une
femme assise dans un fauteuil roulant et regardant la
mer: j’étais clouée sur place.
La scène du fauteuil
roulant
planté
dans le sable
semblait étrange
au milieu de tout cet espace ouvert suggérant la liberté.
J’avais
peur de me
tenir devant elle
et de lui rappeler
son
handicap – je ne voulais pas tremper mes pieds dans
l’eau et qu’elle les déteste.
J’ai donc planté mes
pieds
dans
le sable et
je me suis contenté de regarder à
une distance de sécurité où je ne pouvais pas être vu.
Quelques
instants plus tard, la femme se leva et s’éloigna de quelques pas
du fauteuil roulant : elle se tenait fermement debout et ruina le
poème.
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