Joyce Mansour


 

A André Pieyre de Mandiargues

LES MORTS AUX TÊTES DE CHIEN

Je sais que les morts en coït muent et réapprennent à souffrir

Quand la lune sort sa verge aux yeux de pluie

Ils bougent dans leurs plaies et tournent et semblent défaillir

Endiablés par le vide

Perdus disloqués

Ils emplissent l'air de leurs membres ouvrent leurs bouches crient

Des perles bourgeonnent sur leurs jolis moignons

Le lait jaillit

Mais la bruine gonfle les cieux où nage la pourriture

Noyant même les morts aux yeux endimanchés

Noyant les tyrans qui se disputent l'éternité

Faisant flotter hommes et biens

Femmes enfants hommes chiens chiens à tête d'homme

Tous ces chiens d'hommes

Ces biens d'hommes

Dans la soupe filandreuse

Du néant

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