La bibliothèque d'Alexandrie
Le général macédonien Ptolémée reçoit l'Egypte à la mort d'Alexandre. Il fait d'Alexandrie (fondée en 351 par Alexandre) sa capitale, qu'il veut embellir. A son initiative, le philosophe Démétrios de Phalère constitue les bases de la plus grande bibliothèque du monde antique qui accueillera jusqu'à 500 000 volumes.
Demetrios avait eu les pleins pouvoirs sur la bibliothèque. De temps en temps le roi passait en revue les rouleaux, comme si c'était des manipules de soldats.
« Combien de rouleaux avons-nous ? » demandait-il. Et Demetrios le mettait au courant des chiffres. Ils s'étaient proposé un objectif, ils avaient fait des calculs. Ils avaient établi que, pour rassembler à Alexandrie « les livres de tous les peuples de la terre », cinq cent mille rouleaux étaient nécessaires. Ptolémée rédigea une lettre adressée « à tous les souverains et gouvernants de la terre », dans laquelle il demandait à ce « qu'ils n'hésitent pas à lui envoyer » les œuvres de n'importe quel genre d'auteurs : « poètes et prosateurs, rhéteurs et sophistes, médecins et devins, historiens, et tous les autres encore ». Il ordonna que l'on recopie tous les livres qui se trouvaient par hasard sur les navires faisant escale à Alexandrie, que les originaux fussent gardés et qu'on remît à leurs possesseurs les copies : ce fond fut appelé ensuite « le fonds des navires ».
De temps en temps Démétrios rédigeait un rapport écrit pour le souverain qui commençait ainsi: « Démétrios au grand roi. Conformément à ton ordre d'ajouter aux collections de la bibliothèque, afin de la compléter, les livres qui manquent encore, et de restaurer convenablement ceux qui sont défectueux, j'ai consacré à cela beaucoup de soin, et je t'en fais maintenant un compte rendu ».
Le dessein poursuivi par les Ptolémées et mis en pratique par leurs bibliothécaires n'était pas seulement le recueil des livres du monde entier, mais aussi leur traduction en grec. Les Grecs n'apprirent pas les langues de leurs nouveaux sujets, mais ils eurent l'intuition que, pour les dominer, il fallait les comprendre, et que, pour les comprendre, il fallait faire recueillir et traduire leurs livres.
Extrait de La véritable histoire de la bibliothèque d'Alexandrie de Luciano Canfora
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