Fathi Afifi

 


Né dans le quartier populaire et très animé de Sayéda Zeinab, Fathi Afifi était lui-même ouvrier dans une usine, une phase de sa vie qu’il évoque avec fierté. Il est resté amoureux du quotidien des ouvriers qu’il a partagé pendant des années. Un univers qui a marqué à jamais son art. La foule garde une place de préférence dans ses oeuvres, c’est le symbole de la fusion, de la communication entre les gens, les généra­tions ...

Afifi appartient à la génération des années 1970. « Une génération dotée d’un sens du patriotisme et d’un sentiment de révolte contre le capitalisme sauvage, la corruption et le favo­ritisme », dit-il. D’où la délectation qui accom­pagne ses souvenirs des jours passés sur la place Tahrir lors de la révolution de 2011. « Pain, liberté et égalité sociale sont des réclamations populaires qui me réjouissaient le coeur. Hélas, suite à ces 18 jours de révolte, je me suis retrouvé dans une dépression totale. La scène ne m’était pas assez claire. J’ai préféré arrêter de travailler, prendre du recul et me contenter d’observer », se souvient-il.



Etats d’âme

Ancien ouvrier, défenseur des ouvriers, il ne manque pas pourtant de se laisser emporter par l’inquiétude, la solitude et l’oppression qu’évoque cet univers ... des sentiments qu’il exprime en tant qu’artiste. D’où les toiles repré­sentant le jour de la paye, le caissier derrière le guichet, les ouvriers faisant la queue qu’on voit de profil, ou alors cette peinture illustrant le contremaître avec ses ouvriers, ou encore celle de l’ouvrier à vélo portant une planche à pain sur la tête. Et les scènes déferlent : des ouvriers qui font une pause ; un wagon de train de 3e classe avec des passagers simples et épuisés après une journée de travail ; une station de métro où les usagers en bousculade ne sont plus qu’un ensemble flou. Avec ses protagonistes-ouvriers, l’artiste multiplie les scènes mouve­mentées, évoquant à tout temps un même des­tin, « un destin certes dramatique, mais tout aussi intime et fraternel », dit-il.

Et qui dit ouvrier dit machine. A côté de laquelle, dans les peintures de Afifi, les hommes se réduisent à de petites taches presque iden­tiques. « Nous sommes souvent des esclaves de la technologie. J’ai aimé capter cette scène d’en haut, comme vue par un oiseau, en utili­sant essentiellement le noir et blanc », com­mente Afifi.

« Je recours au noir et blanc lorsque je me sens déprimé », explique-t-il. « Alors que le bleu répond à une réalité faite de tension. C’est aussi la couleur de l’uniforme, et ça me rend nostalgique. Une nostalgie que je ressens éga­lement dans quelques-unes de mes peintures aux couleurs gaies et vivantes, celles de mon quartier de naissance ».






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