Abou el Kacem Chebbi
Poète tunisien de langue arabe, considéré comme le fer de lance du romantisme en Afrique du Nord, Abou El Kacem Chebbi (également orthographié : Abul Qacem Chebbi), le « Rimbaud du Maghreb », est mort à l’âge de vingt-cinq ans, en 1934
Abou El Kacem Chebbi est né le 24 février 1909, dans le hameau de Chabbiya, devenu aujourd’hui l’un des quartiers de Tozeur (correspondant au lieu-dit Ras El Aïn), ville du Sud de la Tunisie et opulente oasis. Chebbi naît dans une famille aisée. Son père, cheikh Mohamed Ben Belgacem Chebbi est un cadi, soit un juge musulman remplissant des fonctions civiles, judiciaires et religieuses. La famille devra se déplacer à travers le pays, en raison des affectations successives du père qui, confesse le poète : « Il m’a fait saisir le sens de la bonté et de la tendresse, et m’a appris que la vérité est la chose la meilleure dans ce bas monde, et la chose la plus sacrée dans l’existence. » Chebbi écrit ses premiers poèmes à l’âge de quatorze ans et reçoit une éducation traditionnelle à l’école primaire coranique, puis de 1920 à 1928, à l’Université Zitouna de Tunis, le plus ancien établissement d’enseignement du monde arabe, puisqu’une médersa y fut fondée dès 737.
Le 3 octobre, il est admis à l’hôpital italien de Tunis pour une myocardite. Pendant ce temps, à Tunis, le leader indépendantiste tunisien Habib Bourguiba (qui sera le premier président de la République de 1957 à 1987), a demandé la souveraineté nationale et l’avènement d’une Tunisie indépendante. Il a été arrêté et placé en résidence surveillée avec d’autres indépendantistes. Des émeutes éclatent aussitôt partout dans le pays, alors qu’Abou El Kacem Chebbi meurt, au matin du 9 octobre 1934. Il est à peine âgé de vingt-cinq ans, laissant cent trente-deux poèmes, un journal, des lettres et des articles parus dans différentes revues d’Égypte et de Tunisie. Ses Chants de la vie ne paraîtront qu’en 1955, au Caire, vingt et un ans après sa disparition : Ni les vagues du désespoir - ni les malheurs soufflant en tempête - n’éteindront les flammes qui circulent dans mes veines.
Rêves de ma jeunesse
N’ont-ils pas, de naissance,
Une santé chétive et faible
Les rêves des jeunes hommes
Brisés comme des branches par les malheurs incessants
Qui tombent ainsi que la grêle ?
J’ai demandé aux ténèbres
Où avaient disparu
Les rêves de ma jeunesse
Elles m’ont répondu :
Les vents obliques les ont chassés
Les dispersant en tous sens.
Et lorsque j’ai demandé aux vents où donc ils les
Avaient emportés, ils répliquèrent :
Les torrents du destin les ont engloutis
A tout jamais
Dans les flots noirs du malheur.
Ils sont devenus poussière, fumée, néant
Tel le grain broyé dessous la meule,
Envolés sur les rivages de fièvre,
Proie des flots noirs
Où la vague affreuse, crie.
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