Gong Ji-Jung
Inho est engagé dans une école pour sourds-muets ; c'est sa première journée de professeur
Bonjour, je suis ravi de faire votre connaissance. Je m'appelle Kang Inho.
Il s'exprime lentement et maladroitement dans la langue des signes. Voyant qu'il essaie de communiquer avec eux, les enfants réagissent. Une petite vague d'émotion passe sur leurs visages figés. C'est un bon début. Après tout, les enfants restent des enfants. Il se détend un peu et écrit un poème au tableau :
Trois allumettes une à une allumées dans la nuit
La première pour voir ton visage tout entier
La seconde pour voir tes yeux
La dernière pour voir ta bouche
Et l'obscurité toute entière pour me rappeler tout cela
En te serrant dans mes bras.
Jacques Prévert, Paris de nuit
Inho sort trois allumettes d'une boîte qu'il a apportée et signe le poème en les craquant l'une après l'autre. A mesure qu'il désigne d'un geste de la main d'abord le visage, puis les yeux, et enfin la bouche des élèves, leurs mines inexpressives s'éclairent comme un verre opaque gagnant en transparence et, à l'image d'un film en noir et blanc soudain colorisé, prennent des couleurs.Cette petite performance qu'il a préparée semble réduire d'un coup la distance qui le sépare de son auditoire. Il a l'intuition qu'ils vont bien s'entendre ; sa confiance en lui en sort renforcée.
Pourtant un des garçons ne bouge pas et pleure.
Lorsqu'Inho se retourne, une fille tient entre ses mains une feuille blanche sur laquelle elle a écrit en grand : Hier, son petit frère est mort.Son visage est empreint d'inquiétude ; sans doute se demande-t-elle si elle a raison d'agir ainsi. Avant même qu'il puisse répondre, un garçon lève une autre feuille sur laquelle Inho lit : Nous savons qui l'a tué.
Les enfants du silence
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