Horacio Castellanos Moya
Il faut lire Horacio Castellanos Moya. Cet écrivain salvadorien, né au Honduras, est une plume étonnante. Déjà son dernier livre « L'Homme apprivoisé » m'avait causé un grand plaisir. Dans ce roman bref mais intense, il revient à l’un de ses sujets centraux : le déracinement des hommes et des femmes qui ont subi la violence et qui n’arrivent à trouver refuge ni chez eux ni ailleurs. Ce qui m'avait incité à trouver un autre ouvrage de cet auteur. Je suis tombé sur « Le dégoût, Thomas Bernhard à San Salvador » et je n'en suis pas revenu. Roberto Bolaño a écrit à propos de ce livre :
Son humour acide est une menace pour la stabilité hormonale des imbéciles, qui en le lisant ressentent un irrépressible besoin de le pendre en place publique. Et, de fait, il a reçu plus de menaces de mort que de prix littéraires.
… on ne peut pas s'intéresser à la littérature et choisir un pays aussi dégénéré que celui-ci, un pays où personne ne lit de la littérature, un pays où le peu de gens qui lisent ne liraient jamais un livre de littérature, même les jésuites ont fermé les cours de littérature dans leur université, ça te donne une idée, Moya, ici personne ne s'intéresse à la littérature, et c'est pourquoi les jésuites ont fermé les cours, parce qu'il n'y a pas d'étudiants en littérature, tous les jeunes veulent étudier le management d'entreprise dans ce pays, ça c'est intéressant, pas la littérature, tout le monde veut faire des études de management d'entreprise dans ce pays, en réalité dans peu de temps il n'y aura plus que des managers d'entreprise, un pays dont les habitants seront tous des managers d'entreprise, voilà la vérité, voilà l'horrible vérité, me dit Vega.
Cette charge provocatrice et appuyée contre son propre pays est vraiment un manifeste. Elle nous démontre la puissance de la pensée libre et débarrassée des oripeaux du nationalisme et autres formules toute faites pour embrigader les esprits et leur enlever la capacité d'un regard critique. Parfois il faut aller jusqu'à cette outrance pour que le coup porte. On ne sort pas indemne de cette lecture, parce qu'on a peur parfois d'être peu ou prou Salvadorien...
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