Le livre des malins

Les amis et moi nous l'avions couvert de cadeaux. Il prit la fuite. Nous restâmes à l'attendre. Mais à la fin du jour, lorsqu'il nous fallut reprendre la route, je dis à mes compagnons :

  • Nous ne pouvons plus attendre davantage. Nous avons tant patienté que nous avons pris du retard sur notre itinéraire. Il appert que l'homme a menti. Préparez-vous à partir et pas un regard ni à dextre, ni à sénestre, sur les jolies femmes de cette contrée aride.

Je me levai pour sangler ma monture afin de poursuivre le voyage. Sur le bât de l'animal, de la main d'Abou-Zayd, je trouvai les vers suivants :


Ô toi, qui m'as servi d'auxiliaire

et, seul, m'as aidé

au sein de cette compagnie,


ne crois pas que je me suis éloigné

de toi par lassitude

ou impétuosité.


Mais toujours, j'appartiendrai

à ceux-là qui, ayant alimenté

autrui, quittent la place et s'en vont.


Je donnai ces mots à lire à mes compagnons afin que l'excusât celui l'aurait critiqué. Chacun fut ravi de sa faconde. Toutefois nous demandâmes refuge en Dieu contre ses futurs méfaits. Ensuite de quoi nous nous dépêchâmes et au cours du voyage ne revîmes plus celui qui avait pris nos cadeaux en échange des étincelles de son génie.



Al-Qâsim al-Harîrî

 

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