Kwak Hyo-hwan

Prosternation tibétaine


La rue dans le quartier rectangulaire du Barkhor, qui encadre le temple de Jokhang où demeure la mémoire de l'eau

Parmi la foule des gens qui arrivent, sous le soleil du bref été du plateau

un homme se jette par terre

Il s'appuie, le corps chancelant, sur des béquilles fabriquées n'importe comment

un pas, deux pas, trois pas sur le côté

il se met à genoux, appuie sa main droite au sol

pose sa main gauche et son front sur le sol

puis soutient avec respect le ciel vide de ses deux mains

et de nouveau, un, deux, trois pas sur le côté...


Une ombre bleue passe furtivement


Un tablier de cuir en loques,

des bas de pantalon couverts de crasse

exposant entièrement ses jambes privées de chevilles,

l'homme au visage noir, épuisé

se jette par terre sans cesse, dangereusement

Sur le plateau le plus haut du monde

dans la posture la plus basse du monde

il soulève le monde de ses deux mains

Ni le monde ni le visage de l'homme ne témoignent du moindre trouble

Devant ses yeux repassent les bannières qui flottaient à chaque borne


Lui qui serait venu de la région de Chetang, au sud-est,

en remontant le fleuve Yarlung Tsangpo qui traverse le plateau du Tibet,

il comprend :

il faut rejeter beaucoup de choses à mesure qu'on monte près du ciel ;

il faut rejeter davantage de choses

pour atteindre le lieu le plus élevé ;

solitude, tristesse, péril et angoisse

du lieu le plus élevé au-delà des limites de la végétation,

là où ne pousse aucun arbuste, pas même un brin d'herbe


Combien plus humble devra-t-il encore être ?

Combien de choses devra-t-il encore rejeter ?


 

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