Meteor, une revue de
poésie éditée à Amiens
Amiens, on ne le sait pas toujours, est une ville qui a toujours accueilli la poésie. Je me souviens des jours heureux des années 70 avec l'Atelier de Poésie Ouverte animé par Carlos Edmundo de Ory. Que d'heures magnifiques ont été passées là-bas qui nous ont définitivement attachés à la lecture poétique. Bien des années après, voici une initiative qui mérite qu'on s'y attarde un peu. « Meteor veut s'installer dans la durée éphémère du vol, dans les parenthèses du flottement avant la chute libre, puis refaire la boucle. On n'a pas de catéchisme ni de dogme » Voilà comment Ramiro Oviedo présente la publication. (Il y a quand même quelque chose d'hispano-poétique ou de poético-hispanique à Amiens : après Carlos de Cadix, c'est Ramiro d'Equateur...).
Et ensuite cela commence
très fort, avec Serge Pey, qui nous raconte, entre autres, une
partie de 421, renouant avec Mallarmé et son « coup de dés ».
C'est magnifique, mathématique, érotique, diabolique et
diaboliquement poétique. Il se termine ainsi :
Un poème ce sont trois
dés
que l'on jette d'un seul
coup
et qui en faisant 421
deviennent soudain tout
le comptoir
du monde
où les étoiles viennent
brûler
sur la table immense du
jeu de la nuit.
Ce qui
est très intéressant chez Serge Pey, c'est cette conviction que
finalement la poésie n'a rien à voir avec la littérature.
Un poème est presque
toujours écrit
par ceux qui ne savent
pas écrire
de la poésie
et les poètes recopient
simplement
la beauté surprenante de
leur vie
qui ressemble à un poème
sans mot
comme le geste d'une pute
sur un comptoir
et dans
le poème suivant :
Le poète debout est
anti-écrivain.
En
feuilletant la revue, on tombe sur la photographie de Benjamin
Teissedre et on voit vite que la poésie s'y loge aussitôt. On y
aperçoit même une sirène.
Puis
viennent les dames de Jean-Louis Rambour : On entend dans son
dos le sillage des météores éteints dans la mer. Décidément
les météores sont de retour.
Je ne
peux citer tous les auteurs ici présents, mais je ne peux pas non
plus ne pas mentionner au moins les Equatoriens Juan Romero Vinueza
et Ramiro Oviedo, dont les vers nous surprennent à chaque coin de la
pensée. Il y a des textes qui nous parlent moins, qui nous émeuvent
un brin, qui ne nous concernent que très peu. Mais c'est un jugement
personnel et si le contenu de la revue semble inégal au fil des
pages, c'est bien normal. Pour un premier numéro, c'est une réussite
splendide, d'autant que le papier, la mise en page, la qualité des
illustrations, tout donne envie de lire. Et comme Serge Pey en a
écrit la postface, laissons-lui le mot de la fin en souhaitant une
longue vie à Meteor.
La poésie pète et la
poésie rote.
Une étoile filante tombe
du ciel.
Dans le gouffre noir de
la poésie que plus personne ne lit,
nous déterrons des
lettres blanches.
Il faut qu'un météore
mette définitivement le feu à la terre.
Cette revue va s'y
employer au moins une fois.
Le ciel comme nous a
besoin de chiottes.
Les revues de poésie
servent à cela...
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