Fadia Faqir

 

Mahmoud, mon frère, avait reçu un fusil chargé pour tuer le meilleur étalon de Daffash. La voix de mon père retentissait : « Ils ont tué notre cheval, nous devons tuer le leur, sinon ils vont se mettre à abattre les hommes de notre tribu. » Mon frère était en retard ce jour-là, mais après avoir entendu les coups de feu, nous le vîmes revenir au galop dans la cour obscure. « Sois béni, mon garçon. Le cheval est un membre de la famille al-Moussa. Son sang devait être vengé. » Nous nous regroupions en familles, en clans, en tribus, il fallait protéger notre honneur, venger notre sang et manger ensemble, dormir ensemble à dix par pièce ou par tente, notre destin lié à la même chaîne.

Accueillant la faible lumière du matin sur mon visage, la pluie légère, je comprenais que pour le meilleur ou pour le pire j'avais brisé l'anneau de fer qui me retenait à ma famille. Me voilà dans mon nouveau pays, allant à pied au travail, avec sur les épaules un sac rempli de morceaux de papier, de livres, d'un Thermos de café et d'un sandwich au fromage halloum. J'avais gagné tout ce que je possédais, sauf l'argent que le révérend Mahomey m'avait donné. Je marchais sans être enchaînée à rien, si ce n'est à mes cauchemars. Quand on n'a pas de famille, on ne tue pas de chevaux.


Mon nom est Salma


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