Molière, père du théâtre arabe?
Maroun an Naqqash. Il n ’est pas du tout surprenant que le premier homme de théâtre arabe soit issu d’une famille maronite du Liban. Cette double appartenance culturelle fournit déjà les lieux de légitimation et de justification du discours et de la pratique de ce Libanais, qui, de surcroît, était commerçant de son état, ce qui lui permettait de multiplier les contacts avec les Italiens et les Français. Ses nombreux voyages lui donnaient également l’occasion de découvrir de nouvelles réalités, de se familiariser avec d’autres formes artistiques et d’apprendre de nouvelles langues, outils nécessaires à son négoce. Il maîtrisait d’ailleurs trois langues étrangères (l’italien, le français et le turc), qui lui permettaient de s’introduire dans l’univers culturel européen et d’alimenter les différentes relations qu’il entretenait, lors de ses voyages, avec les nombreuses personnes rencontrées.
Le voyage de Maroun an Naqqash en France fut déterminant dans sa rencontre avec le théâtre de Molière. Il comprit vite que les pièces de Molière renfermaient certains éléments qu’on pourrait retrouver dans les formes populaires arabes et qui séduiraient le public aimant le rire et appréciant, par dessus tout, les histoires sentimentales. La facture comique des textes poussait an Naqqash à transposer l’univers dramatique de l’auteur français dans une société arabe. Il utilisa dans ses textes de nombreux procédés procédés empruntés à Molière : quiproquos, sujets, intrigues, jeux de situations, querelles…
Ce n’est nullement pour rien qu’il commença sa carrière par el Bakhil, une adaptation-actualisation de l’Avare. Il ne modifia pas l’intrigue principale, mais ajouta certaines petites intrigues considérées comme secondaires. Il conserva néanmoins le cadre central de la pièce. En adaptant les textes ou en en empruntant certains éléments, il changea les lieux de l’action, modifia les noms des personnages, retira ou ajouta quelques scènes, habilla les personnages de costumes locaux.
Fasciné par l ’auteur français, Maroun an Naqqash finit par employer de nombreux espaces inspirés de quelques pièces de Molière : l’Avare, le Misanthrope, Tartuffe, l’Étourdi, le Bourgeois gentilhomme… On y retrouva querelles, quiproquos, M. Jourdain, des passages entiers de textes, des jeux de situations, des quêtes amoureuses, des fins similaires…
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