Caracasseries

  D'après une étude, un moustique a affecté le cerveau du président d'Erythrée ; il est devenu irrationnel, sinon fou, en proie à une paranoïa inexplicable et à une folie des grandeurs qui font qu'il a donné l'ordre à ses troupes d'envahir l'Ethiopie, pays gouverné par son frère de sang et allié de toujours. Bref, le moustique a mené le président érythréen à la folie et l'a entraîné dans une guerre coûteuse. Vous pouvez en rire, mais je dois avouer que cette explication m'a sidéré. Si une piqûre de moustique peut mener un président à la guerre, ne suffit-il pas d'un cachet antipaludéen pour ramener la paix ? Vu que les patrons des dictateurs africains sont incapables d'arrêter guerres et conflits divers, pourquoi ne pas essayer une pilule ? Autre médicament qui a échoué : l'ONU. Pour les patriotes, un petit insecte est à l'honneur et fêté pour avoir rendu fou le président. Cela, bien entendu, si vous acceptez la version éthiopienne de...

  Le petit bois sec craquait et chantait en répandant des étincelles tout autour de lui. Je me demandai si c'était ainsi que les étoiles naissaient dans le ciel, mais Papa me dit que c'était un peu plus compliqué que cela. Je le cite : comme le dieu Mawu-Lisa était souvent attristé par un ciel vide et sinistre, pris d'une envie de création, il avait décidé un beau soir de le décorer. Le Dieu suprême avait alors posé quatre signes cosmiques sur un disque plat, ainsi que des graines de plantes qu'il avaient récoltées. Et comme celui-ci tournait de plus en plus vite, il projetait des gouttes d'eau qui s'étaient formées en nuages et en pluie ; quant aux graines qui étaient sèches, elles se dispersèrent et se transformèrent en étoiles. (…) Papa reprit sa leçon d'astronomie. Montrant du doigt quatre étoiles luisantes à l'arrière de trois autres qui étaient plus ternes, il dit qu'on les appelait les Veuves et qu'elles voulaient rattraper les Trois Viei...

  Bewketu Seyoum   est un jeune poète et écrivain éthiopien originaire de Mankusa à Gojjam, au nord-ouest d’Addis-Abeba. Son père est professeur d’anglais et sa mère vient d’une famille de prêtres orthodoxes. Il a publié trois recueils de poésie amharique, deux romans et deux CD de nouvelles. En 2008, Bewketu a reçu le prix du jeune écrivain de l’année par le président éthiopien et en juin 2012, il  a représenté l’Éthiopie au festival Poetry Parnassus à Londres . La porte de la liberté Si des esprits torturés qui ont vécu enchaînés sont soudainement appelés à la liberté, la porte de leur cellule ouverte et les gardes renvoyés chez eux, ils ne se sentiront pas vraiment libres à moins de percer le mur.

  peinture murale en Ethiopie Ils sont aujourd’hui quelques centaines de Jamaïcains, à vivre dans les faubourgs de Shashaméné. Un monde à part, un lieu sacré, dans lequel le non-rasta, le profane, noir ou blanc, ne pénètre que difficilement. On n’efface pas trois siècles d’histoire coloniale. Après la découverte des Caraïbes et de l’Amérique par Christophe Colomb, 15 millions d’hommes et de femmes sont arrachés au continent africain. En 1930, Rastafari Makonnen, 225e descendant du roi Salomon et de la reine de Saba, selon la légende, est couronné empereur d’Ethiopie sous le nom d’Haïlé Sélassié, roi des rois. En 1935, les troupes italiennes de Mussolini envahissent l’Ethiopie. Chassés par la résistance intérieure, avec le soutien des Rastas, l’Empereur retrouve son trône. Pour les remercier, il abolit l’esclavage et leur offre 500 hectares de ses terres personnelles, au sud de l’Ethiopie, à Shashaméné. Pour les rastas, Haïlé Sélassié, le dernier Négus, est le messie rédempteur, Dès...

  Vers 1490, Léonard de Vinci, proche de la quarantaine, établi à la cour de Milan comme peintre, ingénieur et sculpteur, était convaincu de la nécessité de donner un nouveau statut à l'activité de peintre. Les notes qu'il jeta alors, et qui sont conservées dans le manuscrit A de l'Institut de France, attestent cette préoccupation à la fois sur les plans du métier, de la technique et de la théorie. La peinture est pour lui l'accomplissement suprême de l'activité spirituelle : elle est supérieure à la sculpture, qui ignore la couleur et le paysage ; elle est au-dessus de la poésie parce qu'elle explore "les oeuvres de la nature" ; couvrant la totalité du réel et de l'imaginaire, elle suppose une sorte d'enquête scientifique permanente, dont elle manifeste les résultats. Cette idée de l'art-science explique l'élargissement progressif des préoccupations de Léonard, qui substitue au manuel initialement prévu une véritable encyclopédie, de p...

  L'Etudiant et le Babouin Il était une fois un babouin qui avait pris l'habitude d'imiter les moindres faits et gestes d'un étudiant qui vivait non loin de là. Ceci n'avait jamais posé le moindre soucis à l'étudiant qui, chaque soir, se mettait à son travail avec le babouin à ses côtés, jusqu'au jour où celui-ci se mit à bondir sur la table et à crayonner tout son livre d'exercices. L'étudiant se mit en colère. Il se leva et, pour montrer au babouin à quel point il était énervé, il saisit un couteau qui était posé sur la table et fit mine de le menacer en posant le dos de la lame contre sa gorge. Lorsqu'il fut sûr que le babouin avait bien regardé ses gestes et compris sa bêtise, l'étudiant reposa le couteau, se rassit et se remit au travail. Le babouin se leva de nouveau et saisit à son tour le couteau : voulant imiter le jeune homme comme à chaque occasion, il posa la lame contre sa propre gorge... et se tua.

  … Nous (mon père, ma mère et moi) empruntons une rue caillouteuse à l'autre bout de la ville, tournons devant une caserne et des troupeaux de zébus broutant paisiblement l'herbe d'un terrain vague, croisons une volée d'enfants fuyant les pierres que leur lance une vieille folle qui niche entre des poteaux à haute tension, passons devant l'hôpital Tsehaye, du nom de la princesse, qui domine un assemblage hétéroclite de bicoques avec des enfants jouant dans les rigoles, au milieu des fleurs de la maskal, évitons les ânes et les chiens errants, contournons prudemment le rond-point où personne ne s'arrête jamais, poursuivons dans une allée bordée d'eucalyptus sous lesquels marchandes de fruits et colporteurs hèlent les passants, passons devant le gigantesque lion en granit noir du Théâtre Impérial qui nous toise du haut de sa crinière crénelée, nous engageons dans l'avenue Churchill couronnée par la stèle de l'hôtel de ville, qui s'étend entre les...