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Saint Louis en Egypte

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  Saint-Louis est prisonnier. La sultane le regarde longuement, puis elle défait ses cheveux, déboutonne la longue tenue de guerre avec ses tas de ferraille, et la laisse tomber au moment où la lumière s'éteint et il ne reste plus qu'un faisceau bleu sur son corps nu. La mélodie soufie revient. LE ROI – Seigneur... vous êtes nue ! LA SULTANE – Oui, pour désirer, il faut se sentir désirable. La nudité, chez nous est un acte d'alcôve. Elle permet la fusion de nos deux corps. LE ROI – Seigneur, je vous en prie, Majesté, de vous revêtir. Je n'ai jamais vu un corps de femme nue. LA SULTANE – Jamais !!! Même celui de votre femme ? LE ROI – Même le mien... C'est interdit. LA SULTANE – C'est honteux... La nudité est chez nous la métaphore de l'interdit. Comme le spirituel, chez les soufis, est la métaphore de l'éros. LE ROI – C'est pourquoi j'ai été très mal à l'aise quand on m'a proposé hier un hammam. Le corps est tabou chez nous. Le ham...

Pythagore

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  Le récit du philosophe grec Jamblique rapporte comment le jeune Pythagore fut contraint de fuir la tyrannie de Polycrate et comment il aborda en Egypte où il séjourna vingt-deux ans... Comme la tyrannie de Polycrate avait récemment commencé à se développer, Pythagore, qui était alors dans sa dix-huitième année, vit à l'avance où elle aboutirait et qu'elle serait un obstacle à son dessein de vie et à sa soif de connaissance. Il décida donc d'aller en Egypte et justement des marins égyptiens avaient fort opportunément débarqué sur la côte, au pied du mont Carmel en Phénicie, là où Pythagore séjournait le plus souvent en solitaire dans le temple. Et les marins l'accueillirent bien volontiers, parce qu'ils avaient prévu de tirer profit de sa beauté et, s'ils le vendaient, de sa grande valeur. Par la suite, cependant, comme au cours de la traversée il s'était comporté avec tempérance, avec dignité, bref d'une manière conforme à sa nature, ils devinrent mie...

Le Shah voleur

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  On raconte qu'au temps de nos grands-parents la ville d'Aphrasiabad était devenue le théâtre d'une série de vols et de brigandage. Les habitants qui se rendaient au marché en étaient pratiquement réduits à se pincer le nez, de peur qu'on ne leur dérobât sans qu'ils s'en aperçussent. Pas un jour ne passait sans que quelqu'un fût volé, mais on ne parvenait jamais à prendre les coupables. Les gardes de la ville n'étaient bons qu'à faire du bruit avec leurs lances. A la fin, le Shah d'Aphrasiabad devint à ce point irrité qu'il interdit un soir à toute personne de sortir ou de faire du feu. Et, lui, armé d'une grosse hache parcourut la ville. Il tomba sur trois cavaliers, se présenta comme un voleur qui connaît bien les trésors de la ville, et il leur dit : « Mon clin d'oeil est doté d'un pouvoir magique : même si le bourreau est en train de lever son épée pour porter le coup fatal, il me suffit de saisir son regard et de fermer un...

Louqsor

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  Les festivités à Louqsor ne se sont pas limitées à la cérémonie d’inauguration de l’Allée des béliers. Pendant la semaine qui a suivi la grande fête, les citoyens ont continué à célébrer «  le retour de Louqsor au bon vieux temps  », c’est-à-dire au temps où Louqsor jouissait d’un grand épanouissement touristique. Partout dans les rues et sur la corniche, on pouvait entendre retentir les chansons  Baladna Hélwa  (notre ville est belle) et  Louqsor Baladna  (Louqsor, notre ville) jusqu’à l’aube. «  C’était un rêve et aujourd’hui il se concrétise  », explique Naguib Iskandar, un homme âgé dont la maison côtoie le temple de Louqsor et qui est venu avec sa petite-fille prendre des photos-souvenirs aux côtés des barques dorées commémorant la parade d’Opet. Une atmosphère de joie règne parmi les habitants de la ville qui espèrent une relance du secteur du tourisme qui est le gagne-pain de la quasi-totalité des citoyens à Louqsor. La ville, inscr...

La nouvelle Bibliothèque d'Alexandrie

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  L'idée, séduisante et dangereuse, de refaire une Bibliothèque d'Alexandrie est née dans les années 1970. Le parrainage de l'Unesco et divers soutiens internationaux ont permis de la réaliser. Le bâtiment de l'Alexandrina, conçu par les architectes norvégiens du cabine Snohetta, compte onze étages, dont quatre au-dessous du niveau de la mer. Il ne manque pas de symboles. Sa salle de lecture unique, construite sur sept niveaux qui correspondent à sept domaines du savoir, est la plus grande du monde. Le toit de verre, en forme de disque solaire, semble émerger de l'eau ; il est incliné vers la mer, devant la pointe de Silsila, à l'endroit où le fameux établissement de l'Antiquité aurait pu se trouver. Sur le mur d'enceinte, recouvert d'un granit d'Assouan, sont gravés des caractères dans toutes les langues. Une salle de congrès et un planétarium complètent l'ensemble. Dotée des techniques les plus modernes, l'Alexandrina peut être un cent...

Le proverbe du samedi

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  Q uand les mots deviennent proverbes, ils sont plus clairs pour le raisonnement, plus élégants pour l'oreille, plus féconds pour le développement de la conversation. Ibn al-Muqaffa Entre Hâna et Mâna nous avons perdu notre barbe . La légende veut qu'un homme entre deux âges et dont la barbe commençait à grisonner, pour plaire à sa femme et à sa mère, s'est laissé arracher par l'une ses poils noirs (toute blanche la barbe est plus jolie!) et par l'autre ses poils blancs (ça te vieillit!) au point de finir imberbe. La Fontaine reprit le même thème dans sa fable : L'homme entre deux âges et ses deux maîtresses. Un homme de moyen âge, Et tirant sur le grison, Jugea qu'il était saison De songer au mariage. Il avait du comptant, Et partant De quoi choisir. Toutes voulaient lui plaire ; En quoi notre amoureux ne se pressait pas tant ; Bien adresser n'est pas petite affaire. Deux veuves sur son coeur eurent le plus de part : L'une encor verte, ...

Joyce Mansour

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  LE PRIE-DIEU Un pigeon assis sur un sein en acajou Méditait Son bec effacé par un vent maléfique Ses ailes pendues autour de son cou Il méditait Le sein se réveilla et mangea l'oiseau pensif Malgré la puissance du regard de l'oiseau Bien que le sein n'eût pas très faim Malgré la méditation Du pigeon Il y a une vieille sur la route Fatiguée poussiéreuse Trébuchant entre l'âne et la fadeur De l'ombre Il y a les vagues vertes qui voguent dans le bleu Et la mer Il y a des pendus dans les vignes Des grillons qui s'éternisent sur la terre doucement bossue Des enfants dans les oliviers nains Il y a des paysans aux yeux chassieux Des algues et la succion de la boue quand le soleil se retire La nuit s'étend sur la mer les falaises le maquis Et la vieille en noir dans le noir sans paroles inutiles Dort sur son âne l’œil éteint les bras croisés Image de paix et de plainte L'odeur de la justice L'odeur de la patience surhumai...