Cristina Escofet

Avec plus de vingt pièces jouées, est aujourd'hui une des dramaturges les plus reconnues en Argentine. Elle a commencé néanmoins par des études de philosophie et à 23 ans elle était même professeur de philo. Auteur qualifié de féministe, mais qui a surtout étudié dans son œuvre les rapports entre les hommes et les femmes dans ce début de siècle.

"SEÑORITAS EN CONCIERTO" (1993)
Las Señoritas en Concierto sont des comédiennes ambulantes. Elles viennent en marchant depuis l'Histoire. Elles sont une et mille. Peu importe d'où elles viennent. Peu importe leur nombre. Elles se rassemblent et se dispersent pour commenter, chanter ou danser les images les plus anciennes d'un genre vieux comme l'humanité.
Scène 11 – Les vrais demoiselles
Toutes les comédiennes ont revêtu des vêtements des années 20.

SEÑORITA - « Les filles de Flores ont les yeux doux comme des amandes au sucre de la confiserie de Molino et elles portent des rubans de soie qui leur caressent les fesses dans un vol de papillons. Les filles de Flores se promènent en se tenant par le bras pour transmettre les unes aux autres leurs émotions, et si quelqu'un les regarde dans les yeux, elles serrent les jambes de peur que le sexe ne tombe sur le trottoir. Le soir, elles accrochent, toutes, leurs seins au fer forgé de leurs balcons. Et de nuit, comme le faisaient leurs mamans, elles vont se promener sur la place, pour que les hommes éjaculent quelques mots dans leurs oreilles, et le bout phosphorescent de leurs seins s'allume et s'éteint comme des vers luisants. Les filles de Flores vivent dans l'angoisse que leurs fesses pourrissent comme les pommes qu'elles ont laissé passer, et le désir des hommes les suffoquent tellement que parfois elle voudrait s'en débarrasser comme d'un corset, bien qu'elles n'aient pas le courage de couper leurs corps en morceaux et de les jeter à tous ceux qui passent dans la rue... »
“Exvoto”, de Oliverio Girondo. Buenos Aires de Girondo, l920...
Le demoiselle Detrimont a plus d'un motif pour se plaindre : ils ont essayé de la tuer. Ils n'ont pas réussi, c'est certain, puisqu'elle peut nous le raconter...
SEÑORITA DETRIMONT – C'est beaucoup demandé qu'il fasse attention à moi ? Pour moi, aucune importance qu'il soit invalide, que tous le disaient le plus laid... Je lui ai donné mon lit, tout.
CHOEUR - Oh... por favor, señorita, por favor!
SEÑORITA DETRIMONT – Je l'aimais, je l'aimais, je l'aimais. Devait-il me traiter ainsi ?
CHOEUR – Laisse tomber, Detrimont, laisse tomber.
SEÑORITA DETRIMONT – Il a menacé de me quitter, de détruire mes robes et de me mordre !
CHOEUR – Laisse tomber, on te dit. Ce ne sont que les effluves de l'amour-passion, ce n'est rien.
SEÑORITA DETRIMONT – Il est devenu insaisissable comme un chat, et il ne me regardait plus de face. Seulement il m'épiait et il me surveillait même quand je me savonnais.
CHOEUR – Prends un fusil !

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