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Affichage des articles du juillet, 2019
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Vicente Huidobro Créationnisme, ultraïsme... Ce fut, avec dada, le zénithise et le zaoum, une éclosion un peu folle de mouvements poétiques, aussi folle que l'éclosion de pays imaginaires comme la Tchécoslovaquie ou la Yougoslavie. Jeune homme riche et fantasque, Vicente Huidobro débarquait du Chili avec une cargaison d'onomatopées et d'images descendues en parachute (il adorait ce véhicule d'Icare) sur l'Europe encore gazée mais déjà férue d'exotismes lyriques. L'ombre toute chaude d'Apollinaire, le bras valide de Cendrars, les guitares de Reverdy : il n'en fallait pas plus pour que ce Fitzgerald des Andes étonne et séduise. Puis vinrent les années sérieuses, les années graves, les années tragiques. Huidobro était bien oublié à Paris, en 1948, lorsqu'il mourut à cinquante-cinq ans. Alain Bosquet (NRF – juillet 1957) Débarquer des comètes comme des touristes Ensorceler des touristes comme des serpents Récolter des serpents comme des
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Daniela Bojórquez Vértiz Daniela Bojórquez Vértiz (née à Mexico en 1980) explore les relations entre les images photographiques, le texte et ce qu'eux représentent. Elle s’intéresse à la photographie en tant que moyen en relation avec les technologies qui le rendent possible ainsi comme ses implications sociales. Les conditions mentales d'illusion, de névrose et de paranoïa sont concepts récurrents dans sa pratique. Elle a été invitée à des résidences artistiques en Espagne et en France. Son travail est exposé dans des musées, galeries et autres espaces au Mexique, en Italie, en Allemagne, au Pérou, en Espagne, en Equateur et en France.
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Les pruneaux Les acteurs français ont maintenant une façon unique de jouer. Alors le scénariste prévoit une scène qui permet au grand acteur ou à la grande actrice de faire son numéro. En général, c'est très simple. Il faut juste créer un décalage entre la situation et la réaction du personnage. Par exemple : fin d'un repas, une coupe de fruits au sirop. Le personnage masculin (mais ça marche aussi bien avec le personnage féminin) mange un pruneau et manque de se casser une dent avec le noyau. LUI – (dans tous ses états) C'est quoi, ça !!! ELLE – C'est un noyau. LUI – Il y a des noyaux dans la salade de fruits ! Non, mais j'hallucine ! ELLE – Dans les pruneaux, oui, il y a un noyau. LUI – Mais putain de merde, on prévient dans ce cas-là. ELLE – On laisse le noyau dans le pruneau, parce que ça donne plus de goût ; j'ai lu ça. LUI – Ah ouais, plus de goût, c'est vrai, parce que maintenant j'ai le goût du sang dans la gue
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Mario Almela Mario Almela (1940-2017) est un paysagiste amoureux de la campagne, des volcans et des villages du Mexique. Sa peinture se caractérise par une touche rapide et énergique, héritée de l'impressionnisme ; mais son style particulier tient à son traitement de la lumière, au point qu'on l'on a surnommé « le peintre de la Lumière et du Soleil ». Durant soixante ans, il fut à la fois peintre, alpiniste, restaurateur et antiquaire. Ses œuvres se trouvent aujourd'hui, pour la plupart, dans des collections privées au Mexique, aux Etats-Unis et en Espagne.
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Rosario Castellanos Rosario Castellanos peut être considérée comme une des femmes qui ont le plus fait pour que, dans un pays comme le Mexique, soient combattus les préjugés sexistes et machistes. Elle s'est battue pour la cause des femmes qu'elle a liée avec le combat des indigènes. S'il y a un fil conducteur dans tout ce que j'ai écrit, ce ne sont pas les hauts plateaux du Chiapas où se déroule l'action de mes romans, ni l'anticonformisme ou la rébellion d'un groupe contre ses oppresseurs, ni moins encore, ces mêmes oppresseurs enfermés dans leur prison de préjugés dont ils ne sont pas capables de sortir parce qu'en dehors de cela leur vie manque de substance et leurs actes de justification. Non, l'unité de ces livres est constituée par la persistance de certaines figures : la fille déshéritée, l'adolescente enfermée, la célibataire vaincue, la femme mariée frustrée. Il n'y aurait rien d'autre ? A l'intérieur de ces m
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Manuel Mujica Lainez Bomarzo est l'autobiographie imaginaire de Pier Francesco Orsini, prince de la Renaissance promis à l'immortalité par l'horoscope établi le jour de sa naissance à Rome en 1512. Ecrit dans un style baroque effréné, ce roman est un fragment de l'histoire de la Renaissance italienne, une évocation minutieuse du passé où réalité et imagination, histoire et fiction s'entremêlent. L'auteur dépeint un personnage contrefait dont l'âme tourmentée est en perpétuelle contradiction avec son désir lancinant de beauté et de grandeur. J'avais hérité d'une terre et de roches admirables, lourdes d'antiques images ; beaucoup auraient envié mon état, mon luxe, mon influence, mes entrées à la cour pontificale, mon traitement d'égal à égal avec les grands ; je jouissais de l'art en homme raffiné, composais des vers qui ne déméritaient pas à côté de ceux des poètes qui m'entouraient ; j'avais un beau visage aristocratiqu
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Alberto Blanco Voilà un créateur innovant dans chacun de ses recueils, toujours en quête, en recherche. Né en 1951 à Mexico. Poète, narrateur, essayiste, traducteur, artiste plastique, il a même travaillé pour des feuilletons télévisés. Il a étudié la chimie, la philosophie et l’art oriental à l’Université. On ne compte plus les prix et les récompenses qu’il a reçus, parmi les derniers le Prix Hans Cristian Andersen en 2010. Le merle moqueur Le chemin le poursuit : « Le monde est en flamme et toi tu te mets à rire ! » Et la cendre de son image descend lentement de l'eau du ciel. Aux temps de la Lune grise on trouve sur tous les miroirs sa queue blanche et noire. Son reflet est une légende qui parle d'un autre temps : de longs jours sans ombre et de jardins sans hiver. Aujourd'hui il trouve dans la cage les jours trop courts comme des fruits gâtés... Comme des astres d'os flottant à la dérive... Renaissant du feu
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Ecrire l'Histoire Tout ce qu'on sait aujourd'hui c'est que ce sont les vainqueurs qui écrivent l'histoire. Bien sûr, il y aura toujours des chercheurs de civilisations disparues qui feront un excellent travail d'archéologue, mais aujourd'hui le néo-libéralisme a gagné sur l'ensemble de la planète. C'est d'ailleurs ce qu'affirmait le milliardaire Warren Buffet dans le New-York Times en 2006 : There’s class warfare, all right, but it’s my class, the rich class, that’s making war, and we’re winning. On peut se demander toutefois si la situation est irréversible. Non, semblent dire tous les leaders de la gauche européenne de Tony Blair à François Hollande qui ont pratiqué la même politique que leurs prédécesseurs de droite et qui ont même souvent aggravé la situation des travailleurs. Et si l'on pense que si, il y a une autre politique possible, alors on est tout de suite classé parmi les extrêmes. Dans le monde d'aujourd'
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Beisbol de David Gaitan C'est une pièce très particulière. Les partitions sont réparties entre les acteurs par un système de roulettes. David Gaitan aime autant le hasard que le théâtre. Ainsi Beisbol est un jeu pour comédiens. Il semble nous dire : nous ne sommes rien de plus que ce que décident les dès. Nous avons tous peur que le théâtre dise la vérité. Mais en même temps, c'est le risque à prendre. Cette pièce est émouvante et puissante, mais surtout elle est vraie. CARLOS – Nous sommes les acteurs de L'HONORABLE COMPAGNIE DE THEATRE DE L'UNIVERSITE DE VERACRUZ LA ORTEUV JUANA – On dit que nous sommes un groupe de vieux résignés qui a déjà passé le meilleur de sa vie. CARLOS – On dit que nous sommes un bataillon de faiblards qui a jeté ici l'ancre d'une barque rouillée. JORGE – On dit que nous sommes finis. ALBA – On dit que nous ne sommes pas des artistes, juste des syndiqués. HECTOR – On dit que notre moment -qu'on n'a pas
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André Pieyre de Mandiargues et le Mexique J'ai mordu la poussière Non loin du Zocalo Pour ma soif j'ai bu la terre Mêlée à la cendre aztèque La rencontre de Mandiargues avec le Mexique mythique, au cours de son séjour avec Bona en 1958, a lieu à Tehuantepec lorsqu'ils renoncent à n'être que de simples visiteurs. Conviés par les Indiens à prendre part à la fête, ils boivent l'eau-de-vie de mescal que leur verse généreusement « un des vieux hommes de la compagnie à l'air ancien et solennel », puis on leur introduit d'autorité des cigarettes en bouche. Au son de la musique assourdissante, Mandiargues perd conscience momentanément. Au même instant apparaît une fillette en costume d'ange qui brandit une épée de bazar en carton argenté. Brusquement, il reçoit la « rare et brève hallucination où tous les sens ont leur emploi » : l'alcool qui le brûle se confond avec la feuille acérée du mescal et le g
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La frontière de verre La Frontière de verre est un roman de Carlos Fuentes paru en 1995. Sous-titré « roman en neufs récits », cette œuvre fait de l’éclatement narratif la métaphore éclairante d’un pays, le Mexique. En effet, il s’agit d’évoquer la tension de cette nation, entre unité et fragmentation, le prisme d’une identité culturelle et nationale morcelée. Le titre évocateur de La Frontière de verre est calqué sur l’expression apparue dans les années 1970 et bien connue en sciences sociales, the glass ceiling , le plafond de verre, métaphore de l’impossibilité pour un employé d’accéder aux étages supérieurs de son entreprise et donc d’évoluer. Dans le roman de Carlos Fuentes, l’expression transformée désigne l’attraction exercée par les États-Unis sur les Mexicains qui observent, contemplent à travers la vitre (vitrine) de la frontière le rêve américain, et ainsi l’utopie de leurs propres existences. L’époque est d’ailleurs un moment charnière de l’histoire du Mexique,
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El Desdichado Fernando Fernández tient un blog. Dans sa dernière contribution il nous fait part de ses recherches sur le poème de Gérard de Nerval « El desdichado » : El Desdichado Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé, Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie : Ma seule Etoile est morte, – et mon luth constellé Porte le Soleil noir de la Mélancolie. Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m’as consolé, Rends-moi le Pausilippe et la mer d’Italie, La fleur qui plaisait tant à mon coeur désolé, Et la treille où le Pampre à la Rose s’allie. Suis-je Amour ou Phébus ?… Lusignan ou Biron ? Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ; J’ai rêvé dans la Grotte où nage la sirène… Et j’ai deux fois vainqueur traversé l’Achéron : Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée. Le poète mexicain écrit : Me souvenant que les écrivains français avaient l'habitude de lire leurs poèmes dans des cafés bruyants et que c
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Après l'enfer de la nuit, le paradis du matin Ouais, la nuit, vraiment, est trop peuplée d'histoires de monstres pachydermiques à ailes et à nageoires, de sales bestioles qu'il ne fait pas bon rencontrer surtout le soir quand sortent diablement excités rats en goguette et gros chiens en chaussettes rayées ; ils ne rentrent que dans mes rêves sans trêve, mais moi si je savais que ce n'est qu'un rêve je me réveillerais, ce qui ne se produit pas. Par moment, si : je me réveille de ce trépas, mais pour changer de position sur le monde : de droite vient à gauche le monstre immonde ; les affaires réglées depuis bien longtemps abondent et reprennent leurs cours maléfiques aussitôt et je reçois des balles et des coups de couteau dans le dos : va savoir qui a tiré de tous ces salauds! Toujours blessé et jamais vraiment mort, quelquefois enterré et toujours pas mort, et même mort je sais que je respire encore. Cauchemar pesadilla
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Comment le christianisme a assassiné la culture L'historienne britannique Catherine Nixey détaille dans « L'âge de la pénombre » la rapide destruction du monde antique par les mains du fanatisme religieux. On parle d'atrocités en voyant les statues de Palmire décapitées. Leurs yeux de marbre ont vu avec horreur comment des hommes barbus vêtus de noir se sont lancés sur elles au prétexte qu'ils ne partageaient pas cette croyance. Et les attaques récentes des jihadistes comme des édifices culturels ont fait également frémir. Mais ce n'est rien en comparaison de ce que, il y a quelques siècles, la nouvelle religion, chrétienne cette fois, a fait subir à toutes les œuvres d'art qui n'étaient pas de leur goût. Ils ont tout détruit à coups de fanatisme et de terreur. « Durant les quatrième et cinquième siècles, la foi chrétienne a démoli, détruit et fait fondre une quantité ahurissante d'oeuvres d'art » explique l'historienne et journalis