Ch'ae Man-sik

Ch'ae Man-Sik est un écrivain coréen.
Il a fait ses études à Waseda university à Tokyo, puis a travaillé comme journaliste pour Dong-a Ilbo, Chosun Ilbo, et Kaebyok et comme rédacteur pour de nombreux magazines de Gaebyeok Publishing Company. En 1936 il décide de se consacrer à l'écriture.

Il présente des personnages toujours en marge des grands courants du colonialisme, pauvres, ratés, ou même profiteurs, mais hors du décollage industriel. Ce qui n'interdit pas un humour certain.


UNE VIE READY-MADE

Sous la bannière de la « politique culturelle », le gouverneur général Chaedung créa encore davantage d'écoles publiques. Les directeurs d'école parcoururent la campagne pour enrôler des élèves.

Les élèves reçurent des manuels gratuits et des fournitures scolaires. Les citoyens clairvoyants investirent dans la construction d'écoles. Une université privée fut envisagée. Des écoles du soir furent organisées par des associations de jeunesse.

Une nouvelle expression entra dans le langage, l'étudiante, et une nouvelle sorte de femme apparut.

Il y eut des instituteurs, des religieux, des journalistes. Les docteurs et les avocats prospéraient. Les imprimeries et les librairies prospérèrent. Les artistes vivaient de leur métier. La petite bourgeoisie avait tiré les meilleurs cartes, et l'intelligentsia était au milieu.

Mais pour les ouvriers et les paysans, le pays et ses avancées culturelles ne firent qu'ajouter à leur charge plutôt que l'alléger. C'était comme donner une orange et recevoir l'épluchure en retour.

Parmi les intellectuels se trouvaient des gens sans connaissances, possédant seulement un diplôme universitaire et un savoir général, des gens qui ne pouvaient pas trouver de travail. Chaque année, il y en avait mille de plus. Ce furent ceux-là qui firent la plus mauvaise affaire.

Tous les emplois petits-bourgeois étaient saturés. Leur nombre n'augmenta plus. Comme si les intellectuels avaient été attirés pour grimper l'échelle du succès et qu'on avait retiré l'échelle derrière eux. Il n'y avait pas de demande pour ces gens -là.

S'ils n'avaient pas été intellectuels... ils auraient pu devenir paysans. Mais puisqu'ils étaient des intellectuels, quatre-vingt-dix-neuf pour cent de ceux qui essayèrent échouèrent. Les rejetés devinrent déprimés et chômeurs, une réserve culturelle sans pouvoir, et ils émirent de forts sanglots. Ils étaient comme des chiens ayant perdu leur maître et dont personne ne voulait. C'étaient des vies ready-made.

 

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Chagrin d'amour par Dumitru Crudu

K-pop

Han Kang