Brésil 1968-2019

Ce qui se passe aujourd'hui au Brésil, avec l'arrivée de Bolsonaro et des sectes de tout poil, fait penser au film de Glauber Rocha, qui date de 1968. Un couple de paysans brésiliens, touché par la misère, est fasciné par deux personnages violents et mystiques qui symbolisent sa révolte.

Le Dieu noir et le Diable blond, ce sont les rochers secs, le sertão nu. Manuel, assassin par misère, se trouve embarqué dans la folie meurtrière de deux déments qui sont les produits nécessaires de la faim et de l'ignorance. Le Dieu noir, vénéré comme un saint Sébastien libérateur, révulse les foules en prophétisant la mer, la richesse, le triomphe des pauvres. Le Diable blond, plus frénétique, ne veut que vengeance dans le sang. Tous deux conduiront Manuel à tuer, avant d'être eux-mêmes abattus. Mais là encore, c'est la tenace illusion qui triomphe : devant Manuel courant pour échapper à la mort, la mer symbolique se découvre. Mais peut-être s'agit-il d'un véritable espoir.
Un film dont la beauté est sans clin d’œil parce qu'elle est celle de la nécessité d'une histoire qui prend conscience d'elle-même et qui s'ouvre.
Bernard Savoy (NRF – juin 1968)
Avec le Dieu noir et le Diable blond, j'ai fait un film sur la masse paysanne parce que celle-ci est la majorité misérable, la force populaire du Brésil. Chez ces paysans brésiliens, il y a une grande capacité de violence : elle s'exprime de façon mystique - c'est pourquoi je montre ces prophètes " beatos " - ou de façon anarchique, en s'incarnant par exemple dans les " Cangaceiros ". Telle quelle, cette violence révèle un grand besoin de changement social, politique et historique.
Les gens vivent dans la violence, mais n'en n'ont pas conscience. Pour cette raison peut-être, je cherche à faire un cinéma qui soit une sorte d'agression totale. On voit souvent des films qui sont des réflexions ou des spéculations intellectuelles. Ces films, je les aime et je les respecte, mais je pense que le cinéma pourrait impliquer aussi une action plus violente. Etant donnée la réalité du " tiers monde ", je dois faire passer l'action avant la réflexion, et mon cinéma est surtout un travail " d'agitation ". En somme, je voudrais que le Dieu noir et le Diable blond soit une espèce de fable révolutionnaire très fidèle à une tradition de littérature populaire brésilienne.
Glauber Rocha

https://youtu.be/QEsoB05RjGs

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