Conte d'Egypte

 

L'enfant au harem

Un jour s'en va, un jour s'en vient. Le roi du pays fait un rêve étrange : un vautour donne des coups de bec dans un fromage. Ce rêve hante ses nuits, l'obsède au point qu'un matin il appelle son vizir à ses côtés:

• Vizir, j'ai besoin d'un conseil. Toutes les nuits je rêve d'un vautour qui mange à coups de bec un fromage. Comment interpréter ce rêve ?

• Il faut demander aux devins et aux sages religieux.

Ils ont fait venir tous les devins, les voyants, les sages du royaume mais nul n'a pu expliquer le rêve du roi. L'un d'eux cependant a une idée :

• Il faut demander l'avis de 'Ilm el-Ghêb. C'est un enfant, mais il sait des tas de choses. Il a déjà résolu beaucoup d'énigmes...

L'enfant vient au palais avec son grand-père. Le roi lui raconte son rêve. L'enfant dit :

• Tu garantis ma sécurité et celle de mon grand-père ?

Le roi dit :

• Je garantis votre sécurité.

L'enfant dit :

• Tu dois faire tout ce que je te dirai de faire.

Le roi dit :

• Tout ce que tu désires.

L'enfant dit :

• Alors allons dans ton harem.

Quand 'Ilm el-Ghêb arrive dans l'aile habitée par les femmes, il les réunit et leur demande de se déshabiller, complètement. Le roi veut protester mais l'enfant lui rappelle qu'il a promis d'exécuter ses ordres. Le roi ne dit plus rien. Il tremble.

La reine commence, puis trente-huit autres femmes se déshabillent, elles sont toutes nues. La quarantième, elle, refuse d'obéir.

• Ce n'est qu'un enfant, dit le roi rassurant.

La femme s'obstine. Le roi, qui a hâte de voir son affaire se terminer, dégaine son sabre et hurle :

• Si tu ne te déshabille pas immédiatement je te coupe en deux !

Elle s'exécute, tout doucement. Quand elle est complètement nue le roi voit que c'est un homme.

• Voici le vautour, dit l'enfant en montrant l'homme, et voici le fromage, dit-il en montrant la reine !

Un homme qui vit avec la reine depuis des années ! Le roi, blanc de rage, appelle ses soldats et son bourreau et leur demande de couper la tête de la reine, de l'homme et de tous ceux et celles qui connaissaient leur histoire.